AMA : vingt ans de transmission d'un savoir-faire chaussure en voie de disparition

L’Atelier Maurice Arnoult (AMA), qui perpétue et enseigne le métier de bottier – fabrication artisanale de chaussures sur mesure – a récemment fêté son vingtième anniversaire. Profitant de cette occasion, il a rappelé ses différentes formations qui visent à transmettre un savoir-faire en souffrance.

Plus de mille formes, moules en bois qui servent de base à la construction de la chaussure, sont stockées dans les locaux de l’AMA. C’est dire le potentiel de cet atelier, mémoire vivante du métier. Ce pour deux raisons.

La première est que la fabrication de formes correspond à du prototypage que toutes les marques de chaussures ne peuvent (ou ne veulent) payer. Résultat : la plupart d’entre elles travaillent sur des moules déjà existants, ce qui explique le manque d’innovation dans le design des chaussures ces dernières années (l’ornementation change, mais pas la structure).

La deuxième, et sans doute la plus grave, est que le savoir-faire bottier, qui consiste à fabriquer des chaussures sur mesure de manière artisanale, se perd. De même que d’autres métiers liés à la fabrication comme la cordonnerie, le formier (qui conçoit et sculpte la forme), le monteur ou le bottier orthopédique.

L’AMA ou la volonté de former des apprentis aux métiers de la chaussure

Un peu d’histoire : L’AMA a été créée en mars 2005 à Belleville, cinq ans avant le décès de Maurice Arnoult, figure bellevilloise respectée, attaché à la transmission de sa profession et premier à accepter que les femmes soient initiées. En 2009, Michel Boudoux, bottier pour la haute couture, entre en scène et développe des formations de professionnalisation.

L’association est reconnue d’intérêt général et ses formations ont la certification Qualiopi. Certaines entrent dans le dispositif Paris Fabrik, programme de formations professionnelles aux métiers participant à la transition écologique lancé par la Ville de Paris en 2017, en partenariat avec France Travail. D’où la présence de Lyne Cohen-Solal et Nicolas Bonnet-Oulaldj à la cérémonie des vingt ans.

Les formations sont instruites comme suit :

• Stages d’initiation à la botterie traditionnelle : deux sessions par an, en cinq modules, pour introduire aux gestes techniques et aux différentes étapes de fabrication. Ces stages sont un prérequis pour accéder aux cours annuels et à la préparation au CAP.

• Cours annuels de montage/patronage/piquage de chaussures femme et homme. Préparation au CAP Cordonnier Bottier. Promotion paritaire de quatre à cinq élèves par an.

• Ateliers ponctuels de cousu main

• Ateliers ponctuels tout public de réparation, bichonnage et entretien des accessoires en cuir.

Un besoin de reconnaissance exprimé à l’occasion de la célébration des vingt ans d’AMA

La table ronde « 20 ans de dialogue entre les savoir-faire, comment envisager l’avenir ? » a mis en exergue la paupérisation de la profession, principalement due à l’industrialisation, la délocalisation, la consommation de produits jetables (plus à la mode, abîmés, etc.) et une réalité économique : ce métier s’adresse à une élite à même de s’offrir des paires personnalisées, comprenez une forme pour chaque client, dont le prix avoisine 3 000 euros, voire plus.

Sachant qu’il faut compter 70 à 80 heures pour la fabrication d’une chaussure à la main et que c’est un métier difficile, il a donc été question de méconnaissance, reconnaissance et transmission. Vu l’étendue du sujet, les participants ont décidé de réunir les professionnels de la filière cuir avant la fin de l’année 2025. Il serait intéressant de savoir, à cette occasion, quel couturier, présentant en Couture, fabrique ses propres chaussures.

À noter que l’AMA est labellisé Réparateur par Refashion et offre un service de cordonnerie avec le bonus réparation pour les habitants du quartier de La Goutte d’Or.