Comment les entreprises françaises veulent compenser les droits de douane américains
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Paris - Relocalisation, hausse des prix, gels d'embauches... Les entreprises françaises les plus exposées aux Etats-Unis commencent à dévoiler leurs stratégies pour faire face aux conséquences des droits de douane américains sur leur activité.
Luxe
Hermès, connu pour ses sacs Birkin ou ses carrés de soie, entend "compenser intégralement" l'impact des 10% de droits de douane américains en augmentant ses prix de vente aux Etats-Unis "dès le 1er mai et sur l'ensemble des métiers", a déclaré jeudi le directeur général des finances du groupe, Eric Halgouët. La société, au positionnement très haut de gamme, n'a pas précisé le montant de cette augmentation des prix.
"Les clients américains nous resteront fidèles et ceux qui trouvent ça trop cher viendront profiter de nos infrastructures hôtelières à Paris et achèteront au Faubourg (magasin amiral et siège du groupe, situé rue du Faubourg-Saint-Honoré, NDLR)", avait assuré en février Axel Dumas, gérant de Hermès.
Bernard Arnault, dont le groupe LVMH réalise 25% de ses ventes aux États-Unis, a quant à lui appelé les dirigeants européens à régler "à l'amiable" les tensions commerciales, se disant même "favorable" à "une zone de libre-échange" avec les Etats-Unis.
Si jamais ces négociations n'aboutissaient pas et qu'"on se retrouve avec des droits de douane élevés, (...) on sera amené à augmenter nos productions américaines", a précisé M. Arnault. Son groupe possède déjà trois ateliers Louis Vuitton et quatre ateliers de la marque américaine Tiffany aux États-Unis.
Vins et spiritueux
LVMH réalise également 34% de ses ventes de vins et spiritueux (Dom Pérignon, Hennessy, Krug,...) aux États-Unis. "Il faut absolument trouver un accord, comme les dirigeants de Bruxelles semblent essayer d'en trouver un pour la voiture allemande. Pour la viticulture française, c'est vital", a insisté Bernard Arnault.
"Pour les vins et spiritueux, nous avons expédié un certain stock (aux Etats-Unis). Ce n'est pas une solution durable, mais cela nous donne un peu de temps pour réfléchir", avait confié cette semaine Cécile Cabanis, directrice financière de LVMH.
La maison de cognac Rémy Martin, filiale du groupe Rémy Cointreau, a décidé de placer plusieurs centaines de salariés au chômage partiel une semaine par mois jusqu'en juin face aux mesures antidumping temporaires appliquées par la Chine et la perspective de droits de douanes américains, a-t-on appris mercredi de source syndicale. Les marchés chinois et américains représentent environ 80% du chiffre d'affaires de Rémy Martin.
Cosmétiques
Le directeur général de L'Oréal, Nicolas Hieronimus, a évoqué jeudi les mesures que le groupe pouvait adopter "selon ce qui sera décidé" sur les droits de douanes aux Etats-Unis.
"Nous pouvons augmenter les prix, nous avons constitué des stocks et oui, nous pouvons relocaliser une partie de notre production", a-t-il déclaré en marge de la présentation de ses résultats du premier trimestre.
Sur les produits vendus par L'Oréal aux Etats-Unis, il en produit sur place "un peu moins de 50%, environ 30% viennent d'Europe, et le reste provient du Mexique, du Canada et de quelques autres régions du monde", a détaillé Nicolas Hieronimus. Ce qui est importé aux Etats-Unis concerne principalement les produits de luxe (Lancôme, Yves Saint Laurent, Armani...)
De son côté, Interparfums augmentera ses prix de "6 à 7% à partir du 1er août" aux Etats-Unis, son premier marché, pour compenser les 10% de droits de douane, a annoncé jeudi son PDG Philippe Benacin. Le groupe a réalisé 38% de son chiffre d'affaires aux Etats-Unis en 2024.
Industrie
Guillaume Faury, patron d'Airbus, a déclaré mardi que le surcoût lié aux droits de douane devra être payé par les clients qui importent des avions. L'avionneur européen est "exposé" aux droits de douane lorsqu'il importe pour les activités de son usine américaine à Mobile, en Alabama, a affirmé Guillaume Faury.
L'équipementier automobile Forvia, anciennement Faurecia, annonce lui un gel des embauches, la restriction des voyages, l'annulation de la participation à plusieurs salons internationaux (Munich, Las Vegas) et une réduction des investissements, recentrés sur le "strict nécessaire". Ces annonces s'accompagneront également d'une répercussion sur les prix pour les clients, a indiqué le groupe.
Contrairement à la majorité des biens, taxés à 10%, les voitures produites en dehors des États-Unis subissent une hausse des droits de douane de 25%.