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Bilan premier semestre 2025 : La France entre défense et relance

By Diane Vanderschelden

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Dans le pavillon France, Celine présente son exposition temporaire baptisée « Celine Maki-E ». Credits: Courtesy of Celine

Entre loi contre l’ultra fast fashion, chute (relative) des fusions-acquisitions et désindustrialisation persistante, les six premiers mois de 2025 ont été quelque peu agités et teintés de signaux d’alerte pour la filière textile française.

« Un tournant contre la mode jetable » : la France régule l’ultra fast fashion

Adoptée début juin, la nouvelle loi française contre l’ultra fast fashion marque un « virage historique », selon les mots de la ministre de la Transition écologique. Votée à une large majorité, cette loi vise à freiner les importations massives de vêtements à bas prix et à durée de vie très courte, comme ceux proposés par les plateformes Shein ou Temu. Selon Les Echos, le texte prévoit une amende de 5 à 10 euros par produit, pouvant atteindre jusqu'à 50 % du prix hors taxe en cas de récidive. L’objectif assumé est de « désamorcer le modèle économique du textile jetable » et de protéger les filières locales plus vertueuses.

Les premières applications concrètes sont attendues pour le second semestre 2025, avec une surveillance renforcée des volumes d’importation et des pratiques de mise sur le marché.

Le rôle moteur de la France dans la mode mondiale

Le président de l'UFIMT, Yann Rivoallan, a notamment salué la nouvelle loi anti-fast fashion comme un tournant majeur. « C'est un signal fort envoyé à nos partenaires européens et au reste du monde, » a-t-il déclaré lors d'une interview pour Le Figaro, en juin 2025. « Nous ne pouvons pas laisser le textile européen être submergé par des pratiques de production à l'impact social et environnemental désastreux. La France joue ici un rôle de précurseur. »

Cette position de leader se renforce également grâce aux grands groupes de luxe français. Bien que le cœur de l'industrie textile française peine, les géants comme LVMH, Hermès et Kering continuent de soutenir et de développer le savoir-faire hexagonal. Selon une étude de l'Institut Français de la Mode, ces groupes ont massivement investi dans la relocalisation de la production haut de gamme, ainsi que dans la formation des artisans. « Ce sont les garants de notre excellence et de l'attractivité du made in France à l'échelle internationale, » a ajouté Yann Rivoallan, soulignant le rôle crucial de ce secteur dans le rayonnement de la filière.

Un tissu industriel à protéger

Malgré les ambitions de relocalisation, le constat reste peu enthousiasmant. « Moins de 10 % des vêtements vendus en France y sont effectivement produits », rappelle le cabinet Pragma Études dans une note relayée par Les Echos. Le secteur textile hexagonal compte environ 2 400 entreprises et 58 550 salariés, indiquait l’Union des industries textiles, en décembre 2023, mais la majorité d’entre elles sont des PME exposées à une forte compétition internationale. En cause, des coûts de production élevés, des difficultés de recrutement, mais aussi la hausse du prix de l’énergie et des matières premières.

Chute des fusions‑acquisitions : entre normalisation et correction de marché

Selon le dernier rapport semestriel du cabinet PwC, le nombre d'opérations de fusion-acquisition dans la mode a chuté de 26 % entre janvier et mai 2025, passant de 35 à 26 deals dans le monde. Malgré quelques rachats emblématiques, dont Skechers, Palm Angels ou Versace, les investisseurs financiers se montrent de plus en plus sélectifs, concentrés sur les marques à forte notoriété ou les actifs offrant des flux de trésorerie solides.

Cependant, cette baisse doit être remise en perspective. Elle survient après une année 2024 exceptionnellement active, marquée par une consolidation stratégique sans précédent dans le secteur.

Un rapport de Strategic Intelligence pour 2024 indique que le marché de l’habillement a totalisé 304 opérations de M&A, soit une hausse de 7 % en volume, pour une valeur globale de 22 milliards de dollars, soit une croissance de 90 % par rapport à 2023. Cette dynamique a été portée par des méga-opérations comme EssilorLuxottica – acquisition de Supreme ou Kering – prise de 30 % du capital de Valentino. Un bilan mondial plus large, d’après McKinsey, confirme cette dynamique : en 2024, la valeur des transactions supérieures à 25 millions a augmenté de 12 %, malgré un volume global d’opérations en hausse de 8 % (7 784 deals dans le monde).

Le secteur est en phase d’attente. Les grandes opérations sont reportées. L’on semble valoriser davantage les actifs internes et les marques avec une promesse RSE forte, plutôt que la croissance par extension externe.

Au programme pour le second semestre

Les six prochains mois s’annoncent décisifs. L’application effective de la loi contre l’ultra fast fashion, l’avancement du projet européen StitchTogether (et sa Déclaration de Paris), ainsi que la relance potentielle des investissements sont à suivre de près. La filière pourrait bénéficier de nouvelles aides ciblées ou de mesures d’accompagnement à la formation et à la reconversion. Car derrière les discours sur l’innovation et la circularité, se joue aussi la question de la survie d’un pan entier de l’industrie française.

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