Les baby-boomers, l’atout oublié de l’industrie de la mode
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Longtemps ignorés par l'industrie de la mode au profit des jeunes générations, les baby-boomers font un retour remarqué sur le devant de la scène. Ces consommateurs, nés entre 1946 et 1964, représentent pourtant un marché considérable, avec un pouvoir d'achat bien supérieur à celui des millennials et de la génération Z.
En France, cette génération constitue près de 30 % de la population et détient environ 50 % du patrimoine national. Pourtant, comme l'a rappelé l'Institut Français de la Mode (IFM) lors de sa conférence du jeudi 13 février, les principaux acheteurs de mode restent les jeunes. Une situation paradoxale, alors que la génération de leurs parents, souvent mise de côté, possède les moyens et très certainement le désir de consommer.
Une influence culturelle et un pouvoir d'achat incontestables
Les baby-boomers ont profondément marqué l’histoire de la mode. Dans les années 60 et 70, ils ont été à l’origine de l’essor du prêt-à-porter et ont accompagné l’avènement de marques iconiques comme Yves Saint Laurent, Jean-Paul Gaultier ou Sonia Rykiel. Aujourd’hui, cette génération continue d’avoir un impact économique majeur : en 2023, selon une étude du cabinet Bain & Company, les consommateurs de plus de 55 ans représentaient près de 40 % des dépenses dans le secteur du luxe à l’échelle mondiale.
En France, selon Statista, les femmes âgées de 55 à 64 ans consacraient en moyenne plus de 580 euros par an à leur garde-robe en 2017, un montant supérieur à celui des plus jeunes consommatrices. En revanche, selon une étude de l’IFM publiée en 2012, les 15-25 ans consacraient en moyenne 625 euros par an à l’achat de vêtements (hors accessoires et lingerie). Les jeunes générations dépensent en moyenne entre 400 et 500 euros par an en vêtements, selon Statista, avec une différence notable entre hommes et femmes : les hommes âgés de 18 à 30 ans consacraient environ 402 euros par an aux articles textiles en 2019, contre près de 500 euros pour les femmes du même âge.
Une représentation encore timide
Malgré leur pouvoir d’achat et leur fidélité aux marques, les baby-boomers restent sous-représentés dans les campagnes publicitaires et sur les podiums. Pourtant, certaines enseignes commencent à prendre conscience de leur potentiel. L’apparition de mannequins plus âgés comme Maye Musk (75 ans) ou Lauren Hutton (79 ans) dans des campagnes pour Gucci, Fendi et Celine marque un changement de mentalité.
Dans l’univers du luxe, certaines marques comme The Row ou Dries Van Noten développent des collections adaptées à une clientèle plus mature, avec des coupes fluides, des matières nobles et un design intemporel. De leur côté, des enseignes grand public comme Uniqlo et Zara ajustent progressivement leurs collections pour répondre à cette demande, en misant sur des vêtements alliant élégance et praticité.
Un marché à conquérir
L’essor de marques dédiées aux consommateurs plus âgés témoigne d’un changement dans l’industrie. Des enseignes comme Lafayette 148 ou Eileen Fisher ont su capter cette clientèle en proposant des pièces de qualité, adaptées aux besoins des 50 ans et plus.
Les plateformes de vente en ligne intègrent également cette tendance : des sites comme Net-a-Porter ou MatchesFashion élargissent leurs offres pour inclure des marques prisées par les baby-boomers. En parallèle, les influenceurs seniors, à l’image de Lyn Slater (@iconaccidental) ou Grece Ghanem, gagnent en popularité sur Instagram, prouvant que le style n’a pas d’âge.
Vers une mode plus inclusive ?
L’enjeu pour l’industrie de la mode sera d’intégrer pleinement les baby-boomers dans son paysage, au-delà d’un simple effet marketing opportuniste. Une diversification des représentations, tant dans les campagnes publicitaires que sur les podiums, pourrait non seulement répondre à une demande croissante, mais aussi ouvrir de nouvelles perspectives économiques.
Alors que la mode cherche à refléter toutes les générations, il est temps qu’elle reconnaisse l’importance des baby-boomers, non plus comme une audience nostalgique du passé, mais comme des consommateurs influents du présent et du futur.