Vanderschooten : le « Made in France » comme bouclier face aux tourmentes du textile
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Alors que l’industrie textile française a été durement éprouvée par les vagues successives de délocalisations, la pression de la concurrence internationale et les mutations profondes des habitudes de consommation, un acteur nordiste a fait le choix d’un chemin singulier. Fondée en 1947, l’entreprise familiale Vanderschooten a non seulement résisté aux secousses, mais a prospéré en s’appuyant sur un ancrage industriel local solide et une stratégie de montée en gamme réfléchie. Retour sur une trajectoire de résilience inspirante.
Un contexte de crise qui n’épargne pas le textile
Depuis le début des années 2000, la filière textile française a connu une contraction majeure. Selon l’INSEE, la production a chuté de plus de 60 % entre 2000 et 2020, et les effectifs du secteur ont été divisés par trois. La montée en puissance de la fast fashion, la mondialisation des chaînes d’approvisionnement et les délocalisations ont profondément bouleversé les équilibres.
Implanté à Nieppe, dans les Hauts-de-France, Vanderschooten faisait partie de ces grands noms du textile régional, avec près de 400 salariés à la fin des années 1990. La journaliste Charlotte de Saintignon est partie à la rencontre de ce fournisseur de longue date pour La Redoute, les 3 Suisses ou encore Carrefour ; l’entreprise a elle aussi été rattrapée par les bouleversements successifs et rapides du secteur.
Un virage stratégique vers la montée en gamme
Face à un marché local en repli et à une pression tarifaire accrue, la direction du groupe prend un tournant décisif au début des années 2000. Sous l’impulsion visionnaire de Bernard Vanderschooten, le groupe initie une série d’acquisitions ciblées, rappelle la journaliste dans son article pour le Journal des Entreprises :
- Coucke (1996), spécialiste du linge d’office,
- Alexandre Turpault (1999), marque haut de gamme,
- et via ITC, Essix, Elvé et Designers Guild (2000).
Objectif : élargir le portefeuille de marques, investir les segments premium, et réduire la dépendance à la grande distribution. Cette stratégie permettait également de mieux valoriser le savoir-faire industriel français.
Miser sur la production locale pour garder la main
L’autre fondement de la pérennité de Vanderschooten réside dans le maintien obstiné d’une production ancrée localement. À Nieppe, l’entreprise conserve son propre atelier de confection, employant une cinquantaine de personnes, un choix qui témoigne d'une volonté de maîtriser son outil industriel et son savoir-faire, gage de qualité et de réactivité. En 2022, l’entreprise y a investi près de 2 millions d’euros pour moderniser les équipements et automatiser certaines étapes (machines semi-automatiques, convoyeur aérien…).
Selon Jordan Tourneur, directeur général depuis 2024, cette maîtrise de la production permet à l’entreprise de garantir la qualité, la réactivité, et de s’adapter plus facilement aux demandes de petites séries ou de produits personnalisés, un atout précieux dans un marché en quête d'agilité.
Un modèle économique articulé autour du made in France
Le repositionnement stratégique s’est naturellement doublé d’une affirmation marketing forte autour du « Made in France ». En 2018, la marque À Demain voit le jour, incarnant un linge de maison 100 % fabriqué en France, une démarche confortée par l’obtention du label Origine France Garantie en 2019, répondant ainsi à une demande croissante pour des produits transparents et respectueux de l'environnement et du savoir-faire national.
Ce choix de relocalisation partielle et de production nationale répond à une demande croissante pour des produits traçables et responsables. D’après l’Institut Français de la Mode (2024), 64 % des consommateurs français déclarent privilégier les textiles fabriqués en France ou en Europe. Aujourd’hui, le groupe emploie 180 personnes, exporte dans plus de 60 pays et fabrique encore environ 250 housses de couette par jour sur son site nordiste, un témoignage concret de son engagement local.
Une trajectoire atypique dans un secteur fragilisé
Dans un paysage textile majoritairement tourné vers la sous-traitance étrangère, Vanderschooten apparaît comme une exception notable, une source d'inspiration. Si son modèle reste exposé aux aléas économiques, la combinaison d'une maîtrise industrielle solide, d'une diversification intelligente et d'un positionnement sur des segments à forte valeur ajoutée lui permet de maintenir une activité significative en France. Dès lors, la question se pose avec acuité, la relocalisation, partielle mais stratégique, ne serait-elle pas une voie d'avenir prometteuse pour revitaliser l'industrie textile française ?
- L'entreprise familiale Vanderschooten, fondée en 1947, a prospéré en misant sur un ancrage industriel local solide et une stratégie de montée en gamme réfléchie, malgré la crise du secteur textile français.
- Vanderschooten a opéré un virage stratégique en acquérant des marques haut de gamme et en misant sur la production locale pour maîtriser son savoir-faire et garantir la qualité, la réactivité et l'adaptation aux demandes de petites séries.
- Le groupe a affirmé son positionnement « Made in France » avec la marque À Demain et le label Origine France Garantie, répondant à une demande croissante pour des produits traçables et responsables, et apparaît comme une exception notable dans un secteur fragilisé.