Villa Noailles : le ministère de la Culture exige des économies, la culture mode sous pression
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La Villa Noailles, organisatrice du Festival de Hyères, dédié à la mode, aux accessoires de mode et à la photographie, est mise au pilori par le ministère de la Culture qui pointe du doigt des dépenses et des dettes hors de contrôle.
À l’heure où le ministère de la Culture étrille les budgets dédiés aux associations, la Villa Noailles est concernée. En cause : sa mauvaise gestion financière. Un article paru sur France Bleu relate les faits. La journaliste écrit : « Le ministère de la Culture pointe du doigt, dans un rapport communiqué mi-mars aux collectivités qui subventionnent l'association, la gestion calamiteuse mise en place par la direction du centre d'art Villa Noailles à Hyères, avec notamment une dette fournisseurs de quatre millions d’euros. »
De quoi sonner l’alarme et désigner un coupable, en la personne de Jean-Pierre Blanc, à la tête de la villa Noailles. Son salaire (plus de dix mille euros par mois selon leurs sources) et ses dépenses jugées « extravagantes » seraient responsables de cet état de fait.
Or l’article rappelle que la Villa Noailles, gérée par une association loi 1901, créée en janvier 1998 et nommée Fiamh Villa Noailles (Festival International des Arts de la Mode à Hyères), est en partie subventionnée par des fonds privés pour « près de 2,4 millions d’euros », mais vit grâce aux fonds publics – des villes d'Hyères, Toulon, la Métropole, la Région, le conseil départemental et l’État - pour un peu plus de 3,9 millions d’euros.
Dans un précédent article, FashionUnited avait mentionné l’aide accordée, en 2022, aux organisateurs de festivals : « dans le rapport des subventions attribuées par la Métropole Toulon Provence Méditerranée, l'Association Villa Noailles (FIAMH) a obtenu une subvention de 1 200 000 euros, suite à une décision approuvée le 7 février 2023 ». Cet article mentionnait le fait que l’association ne rendant pas public son chiffre d’affaires, il était, dès lors, difficile d'obtenir une image complète de sa santé financière.
Quid de la mode à Hyères si l’accueil n’est pas (au moins) à la hauteur de son niveau parisien ?
Des sources internes indiquent que de nombreux intervenants auraient été mal ou pas payés, l'argent étant davantage alloué aux réceptions pour les invités. Cela soulève la question de l'attractivité du festival sans un certain niveau de faste, à l'image des événements de mode parisiens qui peinent parfois à attirer hors des circuits habituels.
Aussi, très certainement, il a fallu un message fleuri pour attirer la scène mode et faire rayonner la région à l'international. D'ailleurs, le mur de profil Instagram de Jean-Pierre Blanc est empli de fleurs photographiées dans la pépinière du Jardin des Érythrines.
En somme, la situation s'est compliquée avec le retrait de Première Vision en tant que sponsor du grand prix. Le projet, à l’heure de la publication, est aujourd’hui de garder Jean-Pierre Blanc en tant que directeur artistique et d’économiser près de 800 000 euros par an, via la nomination d’un nouveau directeur général.
De son côté, la Villa Noailles a publiquement réagi sur son réseau social en indiquant avoir conscience des difficultés financières qu’elle traverse, être en lien avec ses partenaires publics pour trouver des solutions pérennes. Elle maintient l'organisation des évènements artistiques à venir. De fait le Festival de Hyères, programmé du jeudi 16 au dimanche 19 octobre 2025, ne semble pas menacé.
La Villa Noailles souhaite redresser la barre mais va devoir réviser sa feuille de route
Elle affirme avoir engagé, depuis le début de l'année 2025, un plan de redressement qui vise à retrouver un équilibre financier tout en maintenant la qualité de sa programmation : « Nous avons ainsi déjà remboursé plus d'1,2 million d'euros de dette fournisseurs, soit près de la moitié de la dette existante, en donnant la priorité aux créances les plus urgentes. Nous avons également pris des mesures de réduction des dépenses, avec un objectif de 845 000 euros de réduction annuelle sur nos charges. »
Pour certains, cela ressemble à un limogeage, à une façon de reprendre la main. « Les élus locaux, soucieux de leurs budgets, financent de plus en plus une culture enracinée localement, ouverte au divertissement « apolitique », marquant une rupture avec des décennies de soutien à des artistes progressistes, relève, dans sa chronique, Michel Guerrin, rédacteur en chef au journal Le Monde.
Pour d’autres, « il est temps de prendre la mesure de la gravité des dérives de ces responsables dont la seule sanction est de se faire gentiment taper sur les doigts » (selon un commentaire posté sur Facebook).
Au-delà de ces polémiques et de savoir si l’argent un vrai/faux bon prétexte, la question est de savoir comment le Festival de Hyères, et par extension les évènements programmés par la Villa Noailles, vont (ou pas) s'adapter à des changements de caps, qui va être le futur directeur de la Villa Noailles à même de collaborer avec quelqu'un qui l'a tenue pendant trente ans, ou si les artistes en résidence vont désormais devoir payer pour séjourner.
Et si, comme le rapporte Nice Matin, les entrées seront dorénavant tarifées pour les visiteurs, ce qui rimerait, de fait, avec une politique publique visant à augmenter le prix de l’accès aux lieux de culture. Pour privilégier une politique sécuritaire et de réarmement de la France ? La question se pose.