Shein scelle un partenariat de taille avec Pimkie, déclenchant une vive controverse dans la mode française
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Shein, leader mondial de la fast fashion, a officialisé la signature d’un partenariat stratégique avec Pimkie, marque française de prêt-à-porter féminin fondée en 1971. Cet accord marque le lancement en France de Shein Xcelerator, programme conçu pour accompagner les marques de mode émergentes et établies dans leur développement international.
Ce rapprochement permettra à Pimkie d’être distribuée dans le monde entier via la marketplace de Shein, tout en accédant aux services logistiques, de production à la demande et de gestion des commandes proposés par la plateforme. La marque française conservera néanmoins la maîtrise de son identité, de sa propriété intellectuelle et de son réseau de magasins physiques.
Lancement d’une créatrice française avec Shein Xcelerator
« Avec le déploiement de Shein Xcelerator en France, nous contribuons à faire rayonner les marques françaises en bâtissant des passerelles avec les 160 pays où nous opérons », a déclaré Donald Tang, président exécutif de Shein. De son côté, Salih Halassi, CEO de Pimkie, estime que « ce partenariat stratégique avec Shein va permettre à Pimkie d’accélérer la croissance de ses ventes en ligne tout en préservant notre ADN et en renforçant notre réseau physique ».
Une stratégie de survie pour Pimkie
Ce mouvement illustre la volonté de Pimkie, récemment relancée par son actionnaire majoritaire Salih Halassi, d’accélérer sa transformation digitale et de diversifier ses canaux de croissance à l’international. L’enjeu est de taille dans un contexte où plusieurs enseignes historiques du milieu de gamme – de Kaporal à Naf Naf en passant par Camaïeu et Jennyfer – ont récemment succombé à la pression du marché. Pour Shein, ce partenariat est une démonstration de force sur le marché français, longtemps critique à son égard. En s’alliant à une marque patrimoniale, le groupe entend se positionner non seulement comme un acteur low-cost de la fast fashion, mais aussi comme un partenaire d’innovation et d’expansion pour les marques locales.
Une réaction virulente, et justifiée, de la Fédération du prêt-à-porter féminin
L’annonce n’a toutefois pas tardé à provoquer une réaction virulente. Yann Rivoallan, président de la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin, a fustigé publiquement l’accord sur LinkedIn. Il y voit « une honte » et n’hésite pas à qualifier l’initiative « d’association de malfaiteurs », accusant Shein de violer les droits sociaux, de saccager l’environnement et de détruire des milliers d’emplois en France. Rivoallan appelle désormais à une coalition européenne pour contrer le modèle économique du géant chinois par des politiques tarifaires et douanières renforcées.
Une fracture au cœur de la mode française
Par-dessus tout, ce partenariat révèle une fracture grandissante au sein de l'écosystème français de la mode. D’un côté, certaines enseignes en difficulté voient dans l’alliance avec des plateformes mondiales un levier de survie et de croissance accélérée. De l’autre, institutions et fédérations professionnelles redoutent la légitimation d’un modèle ultra fast fashion jugé destructeur pour l’industrie, l’emploi et l’environnement.
Le pari est évidemment risqué pour Pimkie. Tout l’enjeu sera de déterminer si ce partenariat lui ouvrira de nouveaux marchés ou s’il érodera son ancrage auprès d’une clientèle française de plus en plus attentive aux enjeux éthiques et environnementaux. Certes, le cœur de cible de Pimkie recoupe largement celui de Shein, laissant entrevoir un potentiel commercial. Mais à l’heure où Bruxelles s’apprête à renforcer son arsenal réglementaire contre l’ultra fast-fashion, une question semble être : le marché suivra-t-il… avant que la loi ne tranche ?